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 Ici vous découvrirez les actualités touchant les organismes communautaires autonomes.

Si les portes des organismes communautaires ne s’ouvraient plus…

par | 16 Mar 2022 | Éditorial

En tant que travailleuse et personne impliquée dans le mouvement d’action communautaire autonome depuis près de 20 ans, je suis toujours aussi étonnée, et de plus en plus outrée, de constater à quel point notre société ne reconnaît pas à sa juste valeur le rôle essentiel des organismes dans nos communautés.

Êtes-vous conscients que chaque année, les portes des 4 000 organismes communautaires autonomes québécois sont ouvertes des millions de fois par des citoyennes et des citoyens aux réalités et difficultés distinctes? Quand ils ouvrent ces portes, c’est pour être entendus, pour qu’on les aide à comprendre et défendre leurs droits, pour briser leur isolement, pour se nourrir, pour se loger, pour exprimer leurs opinions, pour être respectés dans leurs différences, pour être reconnus dans leurs forces, pour reprendre du pouvoir sur leur vie, pour qu’on croit en eux.  

Tentez d’imaginer si ces millions de fois, ou ces femmes, ces hommes et ces enfants tentaient d’ouvrir ces portes, elles demeuraient fermées… Vous croyez que notre système de santé pourrait pallier la demande? Qu’il pourrait accompagner chacune de ces personnes dans le respect de leur rythme respectif et de la globalité de leurs réalités?  Que notre filet social est assez fort pour répondre à l’ensemble des besoins de ses citoyen.nes? Laissez-moi en douter! Pourtant, le gouvernement semble tenir pour acquis le travail quotidien des 60 000 travailleuses et travailleurs qui, trop souvent, doivent se demander s’ils seront en mesure de répondre à toutes les demandes, s’ils devront être en chômage économique par manque de financement, s’ils devront annuler des activités ou services par manque de personnel ou parce qu’il n’est pas possible de boucler le budget.

Bien sûr, tout travailleur, travailleuse ou bénévole qui s’implique dans le communautaire est conscient que tant qu’une personne n’a pas besoin d’un organisme, elle ne le connaît pas, et ce, même si elle passe devant tous les jours! Pour toutes ces personnes, nous continuerons à faire parler de nous, à nous rendre visibles pour le jour où elles, ou un membre de leur entourage, en auront besoin. Mais que le gouvernement, qui dit reconnaître le rôle essentiel des organismes communautaires autonomes, maintienne volontairement les organismes dans une situation aussi précaire de sous-financement, ça c’est inacceptable. C’est freiner tout le travail de prévention fait par les organismes, c’est accepter de laisser des citoyens et des citoyennes sans réponse à leurs besoins, c’est renier l’expertise terrain développée depuis des décennies et, les espaces citoyens que sont les organismes communautaires autonomes.

Quand la pandémie fragilise encore davantage les organismes

Bien que le sous-financement soit présent depuis toujours, la pandémie est venue mettre en lumière de manière encore plus importante cette réalité. En effet, dès les premières semaines de la pandémie, les organismes ont ressenti les impacts directs sur les gens de leur communauté. Comme le démontre la recherche effectuée par l’Observatoire de l’ACA[i], durant le 1er confinement (avril à juin 2020), la grande majorité des groupes de base ont perçu une augmentation des besoins chez les populations et communautés qu’ils rejoignent.

Devant s’adapter aux mesures sanitaires, modifier leurs méthodes de travail, trouver des moyens de rejoindre leurs membres et de répondre aux besoins de la population, la réalité financière du mouvement d’action communautaire autonome en a rattrapé plusieurs, et ce, au même moment où les besoins étaient à leur maximum et que le système public rétrécissait de plus en plus ses accès à la population. En effet, toujours selon les données de l’Observatoire de l’ACA, 73% des organismes bénéficiant de revenus en autofinancement ont indiqué une perte dans ce domaine entre avril et juin 2020, pour un montant moyen de 23 059 $ par organisme.

Ce n’est pas normal que les organismes, au front lors de cette crise, aient dû s’inquiéter au quotidien de leur réalité financière de crainte de ne pouvoir fournir le matériel sanitaire nécessaire à leur équipe de travail, d’offrir conditions salariales adéquates, etc.  La solidarité des organismes, leur capacité d’adaptation incroyable, leurs liens de proximité et de confiance avec leur communauté, leur expertise et leur capacité à identifier les besoins ont fait une différence énorme dans le quotidien de milliers de citoyens et de citoyennes. En investissant les 460$ millions de financement à la mission globale supplémentaire, réclamés par les 4000 organismes communautaires autonomes québécois, le gouvernement viendrait clairement reconnaître et affirmer le rôle indispensable des organismes dans le filet social québécois.

Maya Fernet

Coordonnatrice aux enjeux sociaux

Table régionale des organismes communautaires autonomes de Lanaudière


[i] L’Observatoire de l’ACA c’est un vaste projet de recherche-action visant àdocumenter les impacts de la crise de la COVID-19 sur les groupes d’action communautaire autonome (ACA). Il s’agit d’une initiative du Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA) et de la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC). www.observatoireaca.org/

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